Imaginez...

Publié le par Marc

Imaginez...

Vous êtes au volant de votre voiture. Votre cerveau analyse l’espace, les évènements et les différentes options qui s’offrent à vous. La pression de vos mains et de vos pieds sur les commandes de votre véhicule est savamment dosée ; vos gestes suffisamment précis et vous n’avez aucun un effort supplémentaire à faire. Tout est parfaitement contrôlé, automatisé. Votre cerveau a mis le pilotage automatique. Votre véhicule roule presque tout seul, comme dans les mains d’un cyborg programmé pour arriver à son lieu de destination. Alors que vous observez les merveilleux automatismes de votre corps et de votre néocortex, vous vous faites la réflexion suivante : et si ce n’était pas qu’au volant de ma voiture que j’étais en pilote automatique ? Que mes pensées, mes émotions, bref, bon nombre de mes réactions mentales et émotionnelles pourraient également être en mode automatique ; comme conditionnées par des schémas préétablis depuis bien longtemps.

Vous frappez alors au cockpit : toc toc ! Il y a quelqu’un dans l’avion ? Un pilote absolument conscient de ce qu’il fait ? Un super commandant de bord qui agirait en pleine conscience des choses ? Vous en déduisez que non ; que vous agissez le plus souvent dans la réaction, plutôt que dans l’action. Que ce mode réactif obéit à vos conditionnements que vous avez savamment construits depuis des décennies. Une sorte de programmation qui vous échappe totalement. Vous imaginez vos synapses et vos connexions nerveuses qui s’étant structurées en fonction des évènements de votre vie passée, vous renvoient dans le présent à un jeu de réactions inconscientes pas du tout maîtrisé. Vous osez même faire le raccourci avec l’animal, qui lui, obéit à son instinct et à ses peurs, sans la moindre conscience de ce qu’il fait.
Vous vous dites que si vous étiez conscient de tous vos actes, vous seriez une tout autre personne. Un être lucide, obéissant non pas à son passé et à son émotionnel, mais à sa nature profonde libre et créatrice. Vous en concluez, non sans amertume, que vous n’êtes qu’une marionnette, rien de plus. Mais vous envisagez que vous pourriez décider de ne plus en être une. Vivre en conscience est la clé du problème. Vous prenez note de cette grande découverte.
Perdu dans vos pensées, vous désactivez votre pilotage automatique et vous vous concentrez sur chacun de vos gestes, conscient(e) que vous êtes soumis(e) aux implacables lois de l’apesanteur, de la gravitation et de la force d’inertie. Si vous lâchez le volant, il est certain que vous allez vous attirer de gros ennuis ! Malgré cela, vous ne pouvez tout prévoir et l’imprévisible s’invite dans votre quotidien sous la forme d’un chat qui sans crier gare vous coupe la priorité. En un centième de seconde, votre cerveau reptilien envoie un influx prodigieux à vos muscles et tendons pour écraser la pédale de frein. Dans la même fraction de seconde, votre néocortex considère que le coup de frein ne suffira pas pour éviter le pauvre animal. Un coup de volant s’impose, et comme toute réaction instinctive n’ait pas toujours bien réfléchi, votre voiture fait une embardée et vient heurter le bord du trottoir. Le chat est sauvé, mais votre roue avant a souffert. Les premiers soucis de la journée commencent ! vous dites-vous, l’air dépité.
Vous expérimentez à présent la théorie de l’ordre et du chaos. Surtout du chaos... Naturellement, votre premier réflexe est de vous soulever contre ce désordre. De pester contre ces imprévus qui vous gâchent l’existence ! Vous vous penchez sur votre roue avant droite, constatez qu’elle a pris des airs d’accordéon, mais que le pneu a tenu bon. Vous ramassez les restes de votre enjoliveur qui n’a plus grand-chose de joli et recueillez au passage les propos d’un passant : « Je crois bien que vous allez devoir changer votre roue et peut-être votre pneu, car vous risquez de déjanter après un choc pareil ! » Vous prenez note de la remarque pertinente du brave homme, le remerciez et retournez dans votre véhicule la mine renfrognée.
Sur le retour, votre calculette mentale fait le tour du problème : dépense imprévue, voiture immobilisée, etc. Quelques rues plus loin vous tentez de relativiser en vous disant que le plus important est que le chat soit sauf, et qu’après tout, il y a pire dans la vie. Les quelques minutes et kilomètres qui vous séparent de votre lieu de destination vous entrainent dans une réflexion plus poussée. Une phrase de Nietzsche vous revient à l’esprit : « Le préjugé foncier est de croire que l’ordre, la clarté, la méthode doivent tenir à l’être vrai des choses, alors qu’au contraire, le désordre, le chaos, l’imprévu n’apparaissent que dans un monde faux ou insuffisamment connu... »

Imaginez...

L’imprévu s’invitera toujours sur notre chemin de vie et nous aurons beau faire, nous ne maîtriserons jamais parfaitement notre existence. Tout cela, nous le savons bien, mais il y a une petite voix en nous qui s’y refuse. Notre scénario de vie doit être parfait : un bon conjoint, de beaux enfants, un bon travail, une belle vieillesse, et si possible, une belle mort. Tout doit être beau, parfait et moral du début jusqu’à la fin. Notre bonheur ne peut souffrir de la moindre contrariété. Aucun grain de sable ne doit venir enrayer notre planning de vie si savamment organisée. Rien ne doit dévier de l’ordre établi, car nous devons tout maîtriser. C’est peut-être pour cela que nous nous entourons de contrats pour nous prémunir de ce qui nous lie à l’autre : contrats moraux, contrats de mariage, contrat de travail, sans compter les assurances de toute sorte. Mais peut-être que dans la vie tout est orchestré selon un chaos savamment organisé. Comme disait l’autre, le chaos n’est qu’un principe méconnu de l’ordre. Ou comme le cite un historien américain, Henry Brooks Adams : « Le chaos est souvent source de vie alors que l’ordre génère des habitudes. »

Contrairement à nous, Occidentaux, les Orientaux n’ont pas la même façon de voir les choses. Pour eux, l’avenir ne doit pas être nécessairement maîtrisé de bout en bout. Lao Tseu disait qu’il fallait savoir accepter les choses comme elles sont et vivre dans le Tao, c’est à dire, faire partie intégrante de la « roue » et non se battre sans cesse contre ce qui à nos yeux n’est pas acceptable.

Nous peinons à trouver l’harmonie dans ce chaos « organisé », et pourtant, notre salut et l’équilibre parfait après lequel nous courons tous, réside dans l’acceptation du désordre et de sa remise en perspective. Peut-être alors que derrière le chaos se cache un ordre parfaitement établi. Un ordre parfait. Trouver cette perfection est l’essence même de la spiritualité, du lien direct avec le sacré. Mais pour percevoir une telle perfection, faut-il encore être conscient de ses actes et vivre en conscience chaque parcelle de sa vie, de la vie, jusque dans ses moindres recoins.

Crédit photo : Pixabay

Publié dans Conscience

Commenter cet article

M
Merci de bien avoir voulu partager cet article.<br /> Tout est effectivement dans la capacité à mettre de la conscience sur les choses, et surtout dans ce qui nous arrive dans le présent.<br /> Comme disait Victor Hugo : "“Vivre, c'est avoir la conscience d'être."<br /> Bien à vous
Répondre
A
Bonjour <br /> J'ai apprecié cette<br /> article qui nous fait prendre conscience du moment présent et du lacher prise certe ce n'est pas facile mais quand ont reflechis tout est habitude il suffit de les changer et rester en conscience merci pour cette article qui m'as ouvert les yeux Cordialement
Répondre