L'arbre de nos besoins

Publié le par Marc

Nous vivons dans une société où se créent chaque jour de nouveaux besoins. Pas une journée ne nous est offerte sans que l’on nous abreuve de messages nous incitant à nous offrir tels objets ou services garants de notre bonheur. Des plus utiles au plus futiles, ces objets nous confortent dans l’idée que notre bonheur ne dépend que de l’avoir et non de l’être. Parce que nous ne parvenons pas à nous interroger sur notre véritable nature et à remplir notre vide intérieur, nous nous condamnons à ornementer notre vie de possessions qui n’auront pour seul objet que de nous distraire ou de mieux nous représenter dans notre société.

Mais au fait, quels sont nos besoins ? Qu’est-ce qui nous est indispensable pour être heureux et qu’est-ce qui relève de l’artifice ? Si l’on s’en réfère à la pyramide des besoins du psychologue américain Abraham Harold Maslow, on peut les découper en cinq niveaux :

- Les besoins physiologiques

- Le besoin de sécurité

- Le besoin d’appartenance

- Le besoin d’estime

- Le besoin de s’accomplir

Au fond, nos plus grands besoins sont les besoins de certitude et de sécurité. Comment se sentir en sécurité en ce monde ? Comment être certain que nous allons conserver notre travail, notre intégrité physique, notre conjoint, nos enfants, notre équilibre psychique ? Il n’y a pas de réponses à cela. Le monde est par nature un milieu hostile et chaotique. Eau, air, terre et feu, chacun de ces quatre éléments peut nous détruire. Quant au cinquième, l’éther, il nous cantonne à cet espace limité que notre conscience refuse d’ouvrir.

 

Cependant, dans la tradition bouddhiste, il existe un sixième élément. Cet élément est l’esprit, et il pourrait bien nous sauver. Car tout passe par l’esprit, plus précisément par la hauteur d’esprit ; la compréhension profonde des choses. Si nos besoins de sécurité et de certitude nous obsèdent, nous laissons la place au pire des fléaux : la peur. Et s’il n’y a ne serait-ce qu’une once de peur dans notre vie, il ne peut y avoir d’amour.

Nos peurs rétrécissent l’immense espace de notre conscience. Elles nous confinent dans un univers où tout est matière à division, fragmentation, conflit, opposition. Lorsque nous avons peur, nous disons « non » à la vie ; nous refusons qu’elle se déploie en nous. C’est un manque de confiance que nous lui portons, même si elle peut nous apporter le pire. Mais ce n’est pas dans l’étreinte de l’angoisse, du doute et de la crainte, que nous trouverons la paix. La vie est un énorme terrain de potentialité où tout peut s’engouffrer. Essayons de le prendre ainsi.

 

Pour en revenir à la pyramide de Maslow, il n’y a que très peu de besoins fondamentaux. En revanche, il existe mille façons de satisfaire nos besoins dits secondaires. Est-ce que notre besoin d’estime peut être comblé par une vie sociale débordante ? Est-ce que notre besoin d’appartenance répond à tout le clinquant qui nous entoure pour nous sentir appartenir à une classe sociale digne de nous ? Est-ce notre besoin de sécurité qui nous empêche de claquer la porte au nez à notre patron pour aller voir ce qui se passe ailleurs ? De sortir des sentiers battus et de prendre des risques ?

 

Dans la complexité des besoins humains, nous pourrions en rajouter un nouveau qui en fait les rassemblent tous ou presque : le besoin de donner un sens à sa vie. Mais qu’est-ce que le sens de la vie ? Chacun a sa petite recette pour donner du sens à son existence. Il y a plusieurs façons de donner de la teneur à ses actes. Certains ont besoin de remplir chaque parcelle de leur vie. Faire, refaire, défaire, construire, déconstruire, reconstruire, voir, découvrir, c’est se sentir exister. L’angoisse permanente étant de se retrouver sur son lit de mort à constater qu’on n’a rien fait de sa vie. Mais faire quoi au juste ? Pour quoi faire ? Est-ce que signer des exploits ou voir des choses extraordinaires est gage d'un bonheur durable ? Ne vaut-il pas mieux être présent et heureux dans les tâches du quotidien ? Se sentir vivre et contenté par nos besoins premiers, n’est-ce pas là notre besoin premier ? De prendre la véritable mesure de la vie qui nous anime ; de la vie qui nous vit, quelle que soit sa teneur ; n'est-ce pas là le sens même de l'existence et du sens que nous devons lui donner ? Alors seulement, nos besoins secondaires pourront être comblés et pleinement considérés comme secondaires.

Crédit photos : Pixabay

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