Complice du désir : le manque

Publié le par Marc

Complice du désir : le manque

Le manque fait partie de notre vie et il est à la source de chacun de nos désirs. Mis à part quelques sages ayant atteint l’éveil, nous ne serons jamais pleinement satisfaits ; alors, pourquoi lutter et sans cesse se révolter ?
Déclarer la guerre à la pénurie sous prétexte que tout se gagne en ce monde à la force du poignet est une vaine attitude. Nous pensons que le conflit et la lutte peuvent nous faire avancer, mais ils nous épuisent. Combler un vide est légitime, mais nous devons savoir avec quoi le combler et surtout pouvoir identifier ce vide.
Nous sommes tous animés de désirs plus ou moins importants. Certains nous donnent envie de les vivre pleinement, alors que nous aurons tendance à vouloir en refouler d'autres, car ils ne nous semblent pas convenables.

Un désir provient naturellement d’un manque à combler. En dehors de nos besoins fondamentaux (manger, boire, dormir, avoir un toit), les autres sont des désirs fabriqués. À nous de savoir comment ils sont nés et à partir de quels manques. Ceux-ci, qu’ils soient d’ordre matériel, intellectuel ou spirituel, sont l’exact reflet de notre problématique du moment. Ils ont été créés au gré des influences que nous subissons. Il s’agit donc de mimétisme. Il nous faut alors savoir nous démarquer de ce que nous « imposent » les autres. Éviter la comparaison avec son voisin, cesser de n’avoir d’yeux que pour ce qui se fait ou ce qui est « tendance ».
Le bonheur de l’homme dépend trop souvent de la comparaison avec celui de son prochain. L’influence qu’exerce la société sur lui le pousse à avoir ou à être autant que l’un, sinon plus que l’autre. Il ne s’agit plus alors d’être soi, mais de suivre aveuglément ce que nous dicte le courant sociétal du moment : avoir autant, voire plus que son voisin, être plus fort ou plus ingénieux que son collègue, suivre ce qui se fait pour appartenir au groupe.
La société de consommation crée énormément de besoins, et par ricochet, ne cesse de provoquer de nouveaux manques. À cela, on doit se demander : Qu’est-ce qui fait mon bonheur et qu’est-ce qui cause mon malheur ? De ne pas avoir ce qu’a l’autre ? De ne pas ressembler à l’autre ? Et si tous mes pairs avaient un nez en trompette et des oreilles pointues, serais-je malheureux avec mon nez crochu et mes oreilles en artichaut ? Je n’ai pas d’ailes, est-ce que cela me gêne ? Non, tant que mes voisins n’en ont pas. Alors, à quoi bon nous comparer ? Nous sommes dans la plupart des cas bien nés, quoi qu’en disent les autres.
De par notre passé, nos désirs peuvent aussi obéir à un désordre affectif et à un phénomène de compensation. Toute notre vie, on tente de compenser un vide affectif créé depuis notre plus tendre enfance. On a manqué de ceci et on court après durant des années. Ou bien, dans un rapport inversé, on a eu cela, mais on l’a refusé et l’on part dans le sens contraire. Bref, on ne cesse, notre vie durant, de combler des vides et cela devient à la longue épuisant.
Malgré tout, dans les dédales de notre psyché, le désir peut être tout à fait naturel et maîtrisé. On parle là alors plus d’intention que de désir ou de pulsion subie et incontrôlée. L’on peut tout désirer, même ce qui ne semble pas convenable pour notre société ; il n’y a rien de mal en soi. Inutile de culpabiliser sur certains désirs, ils sont la parfaite image de ce que l’on est et que l’on ressent en cet instant. À y voir de plus près, on peut même découvrir énormément de choses sur nous à travers nos désirs.

SAVOIR, CHOISIR, S’Y TENIR ET S’EN NOURRIR
Nos désirs n’ont de cesse de changer au gré de nos humeurs. Un jour je veux ceci, un autre jour cela, sous prétexte que mon état d’esprit a changé, que la société de consommation a créé de nouveaux besoins, ou tout simplement parce que le temps est passé et a fait son œuvre. Ce ballottement incessant ne permet pas à un désir de se fixer en profondeur dans notre esprit. Le plus beau d'entre eux ne se réalisera jamais si, avant même d’avoir germé en nous, il est supplanté par un autre. Alors, chacun de nos pas mène à un désir, chaque désir non réalisé entraîne une frustration, chaque frustration génère un autre désir. La boucle est bouclée.
Pour avoir une chance de voir ses aspirations se réaliser, n’est-il pas plus sage d’abord de les vivre et de s’en nourrir ? Savoir décréter les choses et poser des intentions, de véritables intentions durables, et non pas papillonner et butiner à gauche et à droite.
Désirer, dans sa forme la plus juste, signifie poser une intention. Inutile de décréter quelque chose de façon autoritaire. Certes, à force de courage, de volonté et de labeur on peut parfois parvenir à ses fins, mais au prix de combien d’efforts ? Il ne suffit pas de dire « Je veux » pour que cela soit, mais plutôt dire : j’aimerais, ou j’aime, y mettre une notion d’amour et se plonger dans l’univers du désir réalisé avant même qu’il ne soit matérialisé.

À PROPOS DE LA LOI D’ATTRACTION
Certains disent que l’on peut tout obtenir dans notre vie grâce à la loi d’attraction. « Demande et tu obtiendras », disait Jésus ainsi que nombreux adeptes de cette loi. Un nombre infini d’ouvrages ont largement abordé le « mystère » de la loi d’attraction. Prendre conscience que tout est affaire d’énergie et d’attraction éveille en soi un certain émerveillement. Admettre que tout est déplacement d’ondes et de particules qui s’attirent et que même la pensée rentre dans ce paradigme-là semble ouvrir grandes les portes pour la résolution de nos problèmes. Cette vérité, quoique difficile à prouver, éveille en chacun de nous un regain de dynamisme et de foi. L’on se dit alors que tout peut nous être offert pour peu que l’on sache se placer dans une demande pure, simple, sans contours et dénuée de toute arrière-pensée. On travaille alors la pensée positive, on décrète notre droit à la richesse et on implore l’univers de nous offrir notre dû. Hélas, dans la plupart des cas, on se heurte au final à nos propres contradictions. Notre esprit est vraiment trop englué dans les dédales de nos fausses croyances et de nos superstitions pour pouvoir s’offrir toute la richesse du monde.
Et pourtant, dans cette simple phrase « Demande et tu recevras » se niche une subtilité qu’il est intéressant d’approfondir. La vie peut tout nous offrir à la condition que nos désirs ne soient pas placés sous la tutelle de notre seul ego. Lorsque ce dernier nous dicte nos envies, il va tenter d’imposer sa loi et de passer en force. Il choisira même le prétexte de l’éthique pour nous conforter dans notre décision ; cependant, le bien et le mal n’ont rien à voir avec tout cela. Un désir, aussi noble soit-il, n’aura pas plus de chance qu’un autre de se réaliser dans l’absolu, si ce n’est que nous bénéficierons de l’aval et du soutien de nos pairs, rien de plus. La valeur morale n'entre pas en ligne de compte.
Pour être parfaitement en adéquation avec le principe du « Demande et tu recevras », il serait d'abord souhaitable d’apprendre à recevoir, c’est presque une lapalissade. Un désir, pour être réalisé, doit être aimé. Toute la vie doit tendre vers l’amour. Aimer, c’est apprécier ce que l’on a et ce que l’on n'a pas. Aimer, c’est avant tout être comblé, c’est la « plein-itude ». Se nourrir de ce qui est présent comme de ce qui est absent. Le sentiment de manque, la supplication et l’imploration n’aident pas les vœux à s’exaucer. Rien ne peut germer d’une âme dans le besoin, car il se cachera toujours derrière, plus ou moins bien camouflés, une frustration, un sentiment de revanche et un ressentiment.

Le vide ne peut attirer le plein. Cette notion de "plein-itude, on la trouve dans le sentiment. Il n’y a qu’un état d'esprit serein, plein d’optimisme naturel et débordant de joie qui peut réaliser un désir, accueillir une nouvelle réalité et la créer dans le monde manifesté. Vivons donc nos désirs dans la félicité, imaginons-les réalisés et laissons-nous envahir par l'émotion que nous ressentons. C’est ainsi, dans la joie retrouvée, que l’on verra ses vœux exaucés.

Il y a toujours quelque chose d’absent qui me tourmente.

Camille Claudel

Crédit photos : Pixabay

Commenter cet article